Didier Stiers: Noël au Balcon est sorti en 1997 : une réflexion, 20 ans plus tard ?
Martine Doyen : En tout cas, c'est un film que j'aime bien, et que j'ai ressenti comme assez « clé ». Il a été présenté dans un festival à New York, ce qui est assez exceptionnel. Je me souviens du jour de la projection : on avait mal évalué les distances, donc je suis arrivée un peu en retard, et quand je suis entrée dans la salle, les gens étaient morts de rire ! Je me suis dit que cet humour noir était peut-être encore mieux perçu par les Anglo-Saxons que dans mon propre pays. Peut-être aussi avait-il quelque chose de très familier pour les New-Yorkais, avec cette maison comme on en voit à Brooklyn, avec les escaliers sur le côté, les étages… Et le film y a finalement gagné le grand prix.
D.S. : Les courts-métrages sont-ils, pour vous, un tremplin vers le long ?
M.D. : Non ! Je pense que ça a un peu changé, si j’observe autour de moi : quand un réalisateur commence du long, ça ne l’empêche pas de revenir au court après, ou de collaborer avec d’autres. Mais à l’époque, c’est vrai, c’était un peu « le court carte de visite ». Pour moi, ça n’a pas du tout fonctionné comme ça, dans le sens où j'ai fait un film par an à partir du premier court et c’est le dernier qui m’a pris un peu plus de temps. Après Noël au Balcon, j'ai perdu pas mal de temps, parce que j'ai voulu faire un long qui ne s'est pas fait. Pâques au Tison est sorti en 2000 et puis j'ai fait Komma, mon premier long, en 2006. Donc voilà, ça ne m'a pas aidée, ce sont deux mondes totalement différents. Peut-être qu'aujourd'hui c'est plus connecté, mais moi, ça ne m'a pas permis de faire des films plus rapidement. C'est vrai que je n'étais pas totalement inconnue à la Commission de Sélection des Films avec mon projet de long, mais s’il faut faire des courts pour faire un long, j’ai des doutes… Jamais, jamais je n’ai conçu un film pour avoir une carte de visite ou pour en tourner un autre après, qui serait dans le même style. J'ai toujours voulu raconter une histoire à part entière avec le medium.
D.S. : Et créer un univers : celui de Noël au Balcon se trouve entre rêve et réalité.
M.D. : Je me suis un peu inspirée de mon histoire, avec la famille maternelle au rez-de-chaussée et la famille paternelle à l'étage, et passer de l’un à l’autre pendant les fêtes. C'est peut-être pour ça aussi que le film a été plus remarqué que les autres : les gens ont senti quelque chose d'ancré.
D.S. : Sans les aides, tout cela vous aurait-il pris plus de temps ? Komma est sorti en 2006 et vous venez d’achever le tournage de Witz, votre second long-métrage, avec Sandrine Blancke et Sam Louwyck…
M.D. : Sans elles, je pense que je n'y serais jamais arrivée. J’ai eu quelques pépins, comme tout le monde, avec des projets qui ne sont pas passés, mais jusqu'à présent, ils me soutiennent quand même. Alors oui, parfois, il y a un scénario qui ne passe pas et quand ça ne fonctionne pas, il faut apprendre à rebondir assez rapidement. Depuis 2006, j’ai aussi tourné deux films expérimentaux, dont Hamsters qui sort en juin à Flagey…
Didier Stiers