Il engage tout d'abord un véritable détective privé afin de retrouver l'œuvre cachée. Nommé Michael Scott, notre protagoniste principal traîne sa grande carcasse et son désintérêt pour la chose artistique à grand coup de recherches sur google et de discussions surréalistes avec le gotha artistique de Los Angeles. À cette étrange narration soutenue par une musique d'ambiance de chaque instant, viennent s'ajouter d'énigmatiques scènes d'action à l'esthétique hollywoodienne volontairement caricaturale. On y aperçoit des acteurs communiquant à coup de "fuck off" et de flingues, une explosion, des rochers (ben oui quand même !) et un hélicoptère bardé de missiles, bref les gros moyens.
On comprendra par la suite que ces scènes de fiction sont en réalité des extraits d'un film commandé par le même Bismuth pour mettre en scène la traque du fameux caillou ! Bismuth a en effet engagé deux scénaristes célèbres (Anthony Peckman et D.V. DeVincentis), créant ainsi une nouvelle temporalité qui s'imbrique aux deux autres. Les trois narrations se superposent dans un montage parallèle où le détective est à la recherche de son rocher, les scénettes d'action s'égrènent au petit bonheur la chance et les scénaristes recherchent un sens profond à tout cela.
Artiste pluridisciplinaire, Pierre Bismuth, notamment "oscarisé" comme co-scénariste pour The Eternel Sunshine of the Spotless Mind de Michel Gondry signe ici son premier long-métrage sous forme de fausse fiction. Si le genre de docu-fiction, dont tout le sel consiste à brouiller les pistes, a habitué le spectateur à chercher la fiction dans le réel, Where is Rocky II ?, joue un jeu différent en nous amenant à questionner la présence du vrai dans cette histoire, la partie documentaire étant filmée comme... de la fiction !
Bien que la mise en scène renvoie à l'univers hollywoodien, Pierre Bismuth s'amuse à déjouer tout ce qui peut en faire le charme. Enjeu quasi inexistant, personnage nonchalant menant une enquête qui piétine, le réalisateur parachève de tuer tout suspens dans l'œuf en soulevant le voile de la création pour nous montrer un envers du décor encore plus vain que l'endroit. Et l'on devine dans cette vacuité une critique gentiment moqueuse du Star system hollywoodien. Que ce soit le jeu face caméra ou le découpage singulier, toute la mise en scène crée une distanciation du réel qui va précisément à l'opposé de l'immersion généralement recherchée par la fiction. Le film trouve ainsi son intérêt dans ce qu'il laisse derrière lui comme questionnements, qui résultent tant des forces que des faiblesses de son processus créatif original.