La question du métissage se trouve au centre de ce film. Un an auparavant, son père a déchiré ses papiers français pour prendre un nouveau départ au Maroc et dévoile subtilement son amertume face à l’ascension sociale de son fils. Les fréquentations de celui-ci avec l’élite française de Casablanca lui sont constamment renvoyées à la figure et il doit se frayer un chemin coûte que coûte pour se faire accepter par sa famille et les habitants du village aux antipodes de ce qu’il a connu dans la métropole. Qu’il s’agisse de foot, de la qualité d’un tissu, de jouets, tout est soumis à une comparaison entre deux univers que tous veulent opposer. La France et le Maroc. La force des émotions transmises par ce film réside aussi dans sa subtile vocation à nous faire réaliser les difficultés qu’un enfant au fort métissage culturel peut rencontrer au moment de savoir d’où il vient et où il veut aller. Il est constamment amené à choisir un camp et son entourage lui rappelle constamment qu’il n’est pas tout à fait là où il devrait être. La vie est-elle si simple si on suit les règles comme le pense Krimo ? Ou doit-il plutôt suivre Medhi et faire les quatre cents coups ? Quelle rébellion mener ?
Car le genre, ses carcans et les difficultés relationnelles pour les enfants qu’il engendre nous sautent aussi à la figure et nous touchent au plus profond de notre âme. Il nous rappelle toute la douleur et l’ambiguïté d’un conditionnement qui nous affecte dès notre plus tendre enfance. Comment passer outre cette injonction à la compétition, à la démonstration d’une performance superflue ? Seul à seul, Karim fait preuve de tant de tendresse avec Nadia, mais doit opter pour le camp des garçons et « montrer sa virilité » au moment de jouer avec tous les enfants. Qui plus est, la condamnation de l’homosexualité s’avère une autre plaie auquel il doit faire face. Petit détour aussi sur la musique signée Simon Fransquet qui nous fait vibrer, tressaillir et offre un accompagnement magistral à ce trésor artistique.