Qui de mieux pour réaliser cet ouvrage de référence que ces deux spécialistes de l’animation qui n’en sont pas à leur coup d’essai. Déjà réunis en 2016 autour de l’ouvrage Le cinéma d’animation en cent films qui retraçait l’histoire de l’animation, toutes techniques confondues, Xavier Kawa-Topor et Philippe Moins restreignent aujourd’hui leur corpus autour d’une seule technique : celle du stop motion qui consiste à filmer image par image des marionnettes articulées, des objets, des jouets, des figurines en pâte à modeler pour leur donner l’illusion de la vie.
Se plonger dans ces 400 pages, c’est embarquer pour un voyage spatiotemporel. Point de départ : le stop motion et la magie avec Georges Méliès. Point d’arrivée : le stop motion et l’art contemporain avec Allison Schulnik. Entre les deux : des centaines de films et de réalisateurs issus des quatre coins du globe. L’ouvrage, qui s’adresse tant aux curieux qu’aux spécialistes, flirte avec l’exhaustivité. On peut le dévorer d’une traite en suivant la lecture chronologique proposée par les auteurs ou le picorer et (re)découvrir un réalisateur, au hasard.
Se lancer dans cette aventure, c’est se laisser guider par deux aficionados qui côtoient le monde du stop motion depuis longtemps. N’oublions pas que Philippe Moins est à l’origine du festival Anima qui se tient chaque année à Bruxelles et que Xavier Kawa-Topor, historien, est l’auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Enrichi de leurs connaissances, l’ouvrage fait preuve d’un grand rigorisme historique et technique entrecoupé de subjectivité aiguisée.
Le lecteur voyage, entre autres, au pays des insectes stars de Ladislas Starewitch, des marionnettes du Tchèque Jiří Trnka, celles de Jan Švankmajer, celles des frères Quay, de Tim Burton, de la pâte à modeler des studios Aardman et de l’Australien Adam Elliot, des explorations du Japonais Tadanari Okamoto, des poupées du Chinois Jin Xi, des clips de Michel Gondry. Les auteurs ne se cantonnent pas aux grandes figures, ils mettent aussi en lumière les réalisateurs de chez nous : les protagonistes de Patar et Aubier de la couverture mais aussi le magnifique Oh Willy… d’Emma De Swaef et Marc James Roels. Une ode au stop motion, à tous ces artisans qui fabriquent, conçoivent, expérimentent sans se laisser apeurer par les nouvelles technologies. Un art de la patience qui prend aujourd’hui tout son sens. Les nombreux photogrammes qui ponctuent l’ouvrage donnent envie de (re)voir ces films mais encore faut-il les dénicher. Ce sont des secrets bien gardés.