Cette « rétro-thérapie » est destinée à aider Yvonne à se souvenir : « Il vaut mieux la laisser dans l’erreur que de la corriger, ce qui risquerait de la déstabiliser encore plus », explique une neurologue (Emilie Dequenne) à Manon. Heureuse, dans un premier temps, de vivre dans la peau de sa défunte mère, de « faire sa connaissance » en portant ses vêtements, en écoutant sa musique, en découvrant les sorties en boîte et son pouvoir de séduction sur les garçons, Manon apprend surtout qu’elle doit faire ses propres choix et non pas répliquer ceux, bons et mauvais, de sa mère. Mais c’est surtout l’influence d’Yvonne qui déteint sur l’ado ! Ancienne avocate, militante féministe très engagée, auteur d’un manifeste sur le plaisir féminin, farouchement indépendante depuis toujours, cette dernière n’a jamais eu besoin de personne pour lui dicter sa conduite. Aujourd’hui réduite à choisir entre l’hospice ou se faire garder par Manon, elle partage avec cette dernière, avec son franc-parler bien à elle, ses opinions bien tranchées sur le fossé hommes / femmes. Manon découvre ainsi la véritable histoire des femmes de sa famille et apprend à son tour à en devenir une.
Une comédie familiale sur fond d’Alzheimer ? Certes, l’idée n’est pas du meilleur goût ; Rétro Therapy proposant une version édulcorée, voire cocasse de cette terrible maladie. Yvonne entre par effraction dans un supermarché en pleine nuit pour y faire ses courses, met ses chaussures dans le frigo, s’enfuit pour « aller travailler », le tout sur un ton enjoué…
L’intérêt du film d’Elodie Lélu, qui signe son premier long-métrage de fiction (après plusieurs documentaires et courts-métrages) réside plutôt dans le récit d’apprentissage de cette adolescente un peu paumée (excellente Fantine Harduin) qui, entre les influences écrasantes d’une malade et d’une défunte, tente maladroitement de trouver sa voie.
Les meilleures scènes du film sont celles qui illustrent le conflit entre Manon et Laurent, un père un peu gauche et vieux jeu, mais bien intentionné, qui, comme dans les films de Claude Pinoteau (on pense à La Gifle et à La Boum), est effrayé à l’idée que sa fille devienne une femme libérée et brûle trop vite ses soutiens-gorges.
Les personnages attachants de cette petite comédie et son casting s’avèrent amplement convaincants pour emporter l’adhésion.