On retrouve dans Le concert un thème cher au réalisateur roumain (établi à Paris depuis les années 1980) : des personnages contraints d’usurper un statut qui n’est pas le leur pour pouvoir échapper à leur destin et s’offrir une vie meilleure. Dans Train de vie, c’est un village entier qui se transforme en convoi de déportés pour échapper - justement - à la déportation et à la mort dans les camps. Dans Va vis et deviens, un jeune Ethiopien se prétend juif Falacha pour pouvoir émigrer en Israël. Ici, des musiciens déchus d’un orchestre russe se font passer pour l’orchestre du Bolchoï afin de prendre une revanche sur la vie de misère à laquelle les ont condamnés les autorités soviétiques. Un rêve fou auquel chacun va adhérer pour des motivations qui lui sont propres, mais qui va réussir parce que chacun saura, au moment décisif, se raccrocher au projet commun. Cette métaphore du contrat social se dévide au fil d’un scénario truffé d’invraisemblances qu’on accepte parce que, derrière la comédie déjantée, se dessinent des personnages aux sentiments et aux motivations profondément humains. Des personnages auxquels donnent vie une brochette d’excellents comédiens. On retiendra la densité des deux principaux comédiens russes, Alexeï Guskov et Dimitri Nazarov qui contribuent grandement à crédibiliser le côté dramatique du scénario. Y répondent la tendresse maternelle férocement protectrice de Miou Miou, la férocité sarcastique de Berléand, irrésistiblement drôle en directeur d’opéra nombriliste, et la gravité tendue de Mélanie Laurent. Et comme toute comédie qui se respecte, le film sait également s’appuyer sur une galerie de savoureux seconds rôles qui lui apportent tout son sel.
Le DVD proposé par Cinéart et Twin Pics propose, outre le film, de très intéressantes interviews du réalisateur Radu Mihaileanu et de la comédienne Mélanie Laurent. Cette dernière y explique notamment tout le travail qu’elle a consenti pour acquérir les gestes et le comportement d’une violoniste virtuose, et assurer une prestation crédible pendant cette longue séquence du concert, qui est le point d’orgue du film. Eclairant.
Le concert de Radu Mihaileanu, edité par cinéart et diffusé par Twin Pics