Ce petit film efficace scinde en deux la vie d'un jeune garçon. D'un côté, ses deux amis, sa petite copine, souriante et flamboyante. Les vélos, la nage, la joie. Quelques 400 coups innocents. Les corps vivent et s'ébrouent. La caméra court avec eux. Et puis, il y a la longue traversée à vélo dans une aube grise d'un chemin broussailleux. De l'autre côté de ce monde vibrant, une maison belle, plane, immobile, endeuillée d'un frère mort, où ne remue plus que le chien. Les plans sont fixes, larges. Le tic-tac des horloges se superposent au bruit de la cuillère à soupe qui racle l'assiette dans les dîners empesés où l'on joue à aller bien. Un mot de trop dans cet univers du semblant fait jaillir des douleurs écrasantes.
Autour des images des reflets de l'eau ou des vitres, si les univers se brisent en deux et se départagent, ils s'avèrent flottants, toujours sur le point de se rejoindre ou de se décaler. Cette fluidité amplifie la tension de l'inévitable moment du face-à-face, où les deux mondes se rejoignent, où la vérité des situations éclate dans la violence d'un reflet désormais cassé... Tendu et électrique, ce second court-métrage affiche un savoir-faire plastique étonnant. En captant des instants de vie, les frères Roosens installent leur film dans des climats qu'ils opposent avec beaucoup d'efficacité. Sorte de plongée en apnée à la Gus Van San dans les méandres d'une tension sourde, Copain filme avec délicatesse, la douleur d'être à soi. Car peu importe qui est derrière la vitre, dans un reflet, on ne fait jamais face qu'à soi-même...