La caméra vogue sur l’eau bleutée avant d’être immergée totalement pour s’attarder sur des détails de jambes voltigeant. Couché sur le rebord de la piscine, Amine observe, concentré, d’un œil intéressé et discret, le groupe de filles s’adonnant à des entraînements de natation synchronisée. La mise en scène rend compte de la répétition des entraînements hebdomadaires, des mêmes gestes aux mêmes heures qui organisent la vie d’Amine.
Noha Choukrallah ne donne pas à voir un portrait classique, mais parvient à mettre en image une crise interne profonde, celle du refus de s’aligner dans la continuité, de suivre, d’assurer un héritage. Avec une certaine pudeur, la réalisatrice mobilise un geste critique de la transmission et prône l’écart essentiel qui fait que son personnage parvient à s’émanciper dans ce conflit générationnel et culturel entre son père et son grand-père qui vit au Maroc.
Alors qu’Amine rejoint finalement le groupe de filles, il se sépare inévitablement de là d’où il vient et du spectre de son père.
L’esthétique du film épouse la grâce et l’agilité des corps dans des plans symétriques des différentes prouesses aquatiques.
Dans cette fiction, la réalisatrice croque avec justesse une relation père-fils dont le conflit interne est très puissant et s’incarne dans la peur de décevoir la figure paternelle, la caméra quitte le domaine de la lutte pour s’épanouir et suivre les choix du jeune garçon.